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Arts & Autographes

Réf : 30794 HISTOIRE

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COMMUNE DE PARIS. ROBERT-DEHAULT (Louis-Rémy Nicolas Robert, dit,) [Droyes, 1821 - Essonnes, 1881], homme politique français.

Ensemble de 4 lettres autographes signées :

Ensemble de 4 lettres autographes signées. 1871 ; 15 pages in-8°. Très intéressant témoignage sur les dernières semaines de la Commune de Paris. — Lettre autographe signée. Sèvres, s.d. [fin mars-début avril] ; 4 pp. in-8°. Il savait que son correspondant avait quitté Paris peu après le massacre de la rue de la Paix [22 mars] ; il lui a écrit sans savoir si sa lettre lui parviendrait. Il est 7 heures du matin et déjà les canons du Mont-Valérien et les batteries de Meudon ont repris leur fusillade. « Les attaques venant de Paris portent avec rage tant sur la rive gauche que sur la rive droite, et ont été jusqu’ici repoussées. L’armée tient bon et a grande hâte d’en finir : elle tient sur toute la rive de la Seine les positions qu’occupait l’ennemi pendant le Siège ! Nous sommes ici littéralement bloqués. Les chemins de fer rive gauche et droite ne marchent pas ; on entre et on sort de Paris à l’aide d’un laissez-passer de la Commune, rarement donné. » Il lit les nouvelles de Paris dans le Gaulois. « Le résultat de cette affreuse lutte ne saurait être douteux et cette guerre des voleurs contre les gendarmes, cette lutte contre la France doit se terminer prochainement. Une machine remorquant une une voiture de 1ère classe est partie hier matin se rendant à Versailles par la rive droite. Elle transportait me dit-on à la station de Ville d’Avray des négociants de Paris, autorisés par le comité de la garde nationale à traiter avec le gouvernement de Versailles. Ils ont fait le soir retour sur Paris par la même voie. Le résultat nous est inconnu, mais la violence des détonations partant tant de Bellevue que du Mont-Valérien ne prouvent pas de l’accord le plus parfait. » Le post-scriptum revient sur cette tentative de médiation. « J’apprends à l’instant que le citoyen Delecluse aurait coffré la Commune, et que les parlementaires d’hier venaient de sa part à Versailles proposer un arrangt, qu’ils seraient retournés avec la réponse que le seul arrangt possible était la reddition de Paris. »… — Lettre autographe signée. Sèvres, dimanche matin [9 avril 1871 ?] ; 3 pages ½ in-8°. Il donne d’autres nouvelles de la situation militaire : « La lutte se prolonge […] et quoique les moyens d’attaque soient formidables la vigilance des gredins de Paris maintenue en éveil et parfaitement renseignée de tous les projets d’attaque […] est continuellement à la parade ; dix bandits derrière ces murs tiennent une compagnie en échec. Il est hors de doute que l’on en vienne à bout mais à moins de circonstances fortuites, je crains bien que l’on ne soit obligé de mettre Paris à la diète comme ont fait les Prussiens. […] La prolongation de la lutte a ce danger de faire dire au populaire qui en somme est bête […] : s’ils résistent si longtemps c’est qu’ils ont raison. Joignez à cela le peu de patriotisme de la chambre en présence d’un danger aussi grand. Les partis s’occupent seulement de leurs petites affaires, et par leurs discordes font encore l’affaire de l’insurrection. L’armée touche aux portes de Paris, l’artillerie qui nous avoisine tonne sans cesse : les obus nous arrivent rarement maintenant. Il y a progrès évidemment, mais la clôture est diablement longue à arriver. » Il rassure son correspondant sur le sort de son laboratoire et de ses collections : tout est intact. Il le renseignera ultérieurement sur l’état de son habitation. Robert se rend parfois à Versailles où il discute avec un de ses anciens amis, intime avec les hommes du 4 septembre et voyant souvent Thiers, Simon, Picard et Fabre. Il ressort « qu’une fois Paris vaincu on procèdera à l’élection des 125 députés manquants (d’ici à deux mois) que d’ici là, la France aura su se faire son opinion, qu’il n’y a que les d’Orléans de possible, et que si la chambre votait la forme monarchique constitutionnelle, le parti républicain se rallierait à ce vote. La pancarte légitimiste a eu maintenant ce bon résultat sur le parti républicain, non socialiste. »… — Lettre autographe signée. Sèvres, mardi de Pâques [11 avril 1871] ; 3 pages in-8° sur papier à en-tête de la Manufacture Royale de Porcelaine et de Peinture sur verre. Rien de nouveau depuis avant-hier : « ces garnds combats d’artillerie ayant pour objectif le fort d’Issy [qui tiendra encore un mois et ne tombera que le 8 mai aux mains des Versaillais] et la porte Maillot a eu pour résultat de fort démanteler le fort, non encore pris, et de démolir le rempart de la porte Maillot par laquelle l’assaut va sans doute se donner. Une fois entrée dans Paris l’affreuse guerre des rues par notre armée va commencer : que de victimes vont succomber sous les coups des brigands qui tiennent la capitale ! Un garnd coup se prépare du reste, et le silence relatif de l’artillerie aujourd’hui me fait penser que Mac-Mahon qui prend aujourd’hui la direction de l’armée, prépare ses Dominos : les Parisiens font de même sans doute : le résultat n’est pas douteux pour moi. Le Diable veuille que l’on puisse d’ici peu passer ces gredins au fil de l’épée ; et que l’on baillonne la clémence ; il y a temps pour tout. » Les nouvelles de Paris ne se lisent plus que dans les journaux de Versailles : « Nous sommes bloqués à Sèvres sans pouvoir même passer les ponts. Les malheureux Parisiens vont en éprouver de rudes ; leur goût pour Mrs les Rouges s’en modifiera peut-être. »… — Lettre autographe signée. Sèvres, s.d. [circa 8-10 mai] ; 4 pp. in-8°. Il assure son correspondant qu’il ne tardera pas à rentrer à Paris : « je ne pense pas que la prise de cet aimable repaire tarde de beaucoup maintenant, et une fois les remparts enjambés le désarroi des communeux sera prompt : les gredins ont perdu énormément de monde dans toutes leurs attaques et les femmes de ces héros du désordre piaillent à qui mieux mieux à la rentrée, intra muros, des bataillons qui reviennent décimés, et qui disent-ils ne veulent plus y retourner : les mégères d’un bon nombre ne retrouvent plus leurs maris, ou tués, ou prisonniers, ou blessés. […] La prise du fort d’Issy va sans doute entraîner la reddition de [Vanves et de Montrouge] : les Parisiens vont maintenant avoir la guerre chez eux et fort indifférents jusqu’alors aux ruines qu’ils ont amoncelées autour de la capitale, vont cruellement souffrir à leur tour : ce sera terrible, à moins que le Dombrowski qui vient de se faire donner des pouvoirs militaires absolus [Rossel l’a nommé commandant en chef de l’armée de la Commune le 5 mai] ne vende un bon prix ses frères d’armes [Robert est bien informé : on lui avait proposé pour trahir un million et demi de francs qu’il refusa] ; Dieu veuille qu’il en soit ainsi ! » Robert décrit ensuite l’explosion d’un ballon près de la barrière d’Issy : « figurez-vous la lune se levant grande et rouge à l’horizon, prenant feu tout à coup en débordant d’une frange éblouissante et disparaissant laissant dans l’air un immense nuage. » Les troupes sont maintenant à 250 mètres de la porte du Point du Jour « où les tranchées se sont faites l’avant dernière nuit à l’insu des communeux. » Une troupe de 30 insurgés ayant été capturée, les Versaillais ne se tiennent plus de joie et Robert ne s’en amuse qu’à demi : « Cette hideuse commune qui nous fait tant de mal, nous fait aussi du bien sans s’en douter, elle relève notre armée, pourquoi faut-il que cette armée soit aux mains de ces impuissants bavards qui n’ont su faire que de l’opposition toute leur vie. Tenez pour certain que si ce second couplet de Sedan ne finit pas comme le premier, c’est uniquement parce que nous n’avons plus affaire aux Prussiens. Toujours est-il qu’il est temps que ce drame finisse, les doctrines communistes pour peu que cela dure, feraient du chemin par toute la France. »… Joint : Le faire-part de décès de Louis-Rémy Robert