logo

Arts & Autographes

Réf : 32310 HISTOIRE

2 000 €

Réserver

NUNGESSER Charles [Valenciennes, 1892 - en Amérique du Nord, 1927], officier et aviateur français.

Lettre autographe signée

Lettre autographe signée, adressée à sa mère. Tucuman, 31 décembre 1912 ; 6 pages in-4°. « Chère Maman, Voilà trois semaines que je n'ai pas écrit et le temps commence à me paraître long, mais en échange j’ai pas mal de nouvelles à t’apprendre. Dans la dernière lettre que je t’ai écrit, je te parlais déjà de mon départ de l’estancia Santa Adela et ce départ n’a pas été tout seul. Mon oncle ne voulait absolument pas que je quitte la maison mais tu comprends bien que je ne suis pas ici en Amérique à 16000 km de ma mère pour gagner 15 pesos par jour en faisant le pion (domestique) de Monsieur Émilie Hautcoeur, bref j’attendais toujours à la casa dans l’espoir des melons, je comptais pouvoir les vendre et en retirer au moins 1500 à 2000 p. et pour comble de malheur ces maudits melons que j’ai eu tant de mal à planter ne valent rien, la semence n'était pas de melon, elle était de cayotte, une plante qui ne se vend pas et tu juges de ma colère quand j’ai su cela. […] Enfin bref toujours est-il que j’ai demandé à mon oncle de partir à Tucuman. À la suite de cette demande, une scène violente s’est produite entre nous deux. Il m’a traité d’insolent, m’a dit qu’il m'avait recueilli, en un mot, j’ai fait ma malle, ma valise et suis parti à Tucuman avec 5 piastres en poche, résultat d’un travail acharné de trois mois. » Sur la recommandation du consul de France, il s’est fait présenter à plusieurs millionnaires de Tucuman. « Monsieur René Hileret m’a dit simplement :“Jeune homme, j’ai trois autos, entre autre une automobile Bayard Clément de 50 chevaux qui n'a jamais marché, si vous pouvez me faire marcher le moteur, je vous prendrai comme mon mécanicien et vous donnerai 180 piastres pour commencer.” Il y a exactement onze jours que je travaille. J’ai démonté l’auto pièce par pièce et j'ai le plaisir de t’annoncer que je suis définitivement chez lui. […] Pour essayer l’auto, il m’a dit de le conduire avec sa fille, une charmante américaine de dix-huit ans dans une montagne à Vio-Etoguès. Moi qui n'ai peur de rien, je t’assure que je n’étais pas à mon aise. La première fois que je conduis une voiture en Amérique, c’est pour monter à 1500 mètres par des chemins épouvantables et toujours au bord de précipices dont on ne voyait pas le fond. Ces Américains sont extraordinaires de sang-froid au bord des précipices. Mlle Grimault chantait, lui lisait le journal avec un chauffeur qui conduisait leur voiture pour la première fois et ne m’ayant jamais vu conduire, c’est réellement extraordinaire. […] Je leur ai montré mon brevet de pilote et il n’aurait rien de drôle qu’il achète un aéroplane. […] J’ai quatre pions pour laver les voitures et astiquer les cuivres ; je vais me promener en auto pour essayer les moteurs une partie de la journée. […] Tu ne vas pas me reconnaître quand tu vas me revoir. Je t’assure que je prends le genre tout ce qu'il y a de plus américain. Autant j’étais bouillant et emporté en quittant la France, autant je suis calme et de sang-froid maintenant. »