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Arts & Autographes

Réf : 33656 LITTERATURE

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COLETTE (Sidonie Gabrielle Colette, dite) [Saint-Sauveur-en-Puisaye, 1873 - Paris, 1954], romancière française.

Pièce dactylographiée signée

Pièce signée. Sans date ; 6 pages in-4°, avec corrections autographes. Très intéressant article dactylographié sur Balzac. « Quand je pénétrai dans cette jungle, La Comédie humaine, je n’avais pas plus de sept ans. Qu’on ne crie pas à la précocité : un enfant très jeune pet prendre plus d’intérêt à Ferrragus XXIII, chef des Dévorants, et même à la Maison Vauquer, qu’à des publications genre Fantômas ou la quinzaine de Miquette. Par où entrai-je dans Balzac ? J’en i perdu le souvenir. Tous chemins sont bons qui accèdent à une première conquête. J’eus la chance que personne ne fermât les vingt tomes de l’édition Houssieux en me disant : “ tu es trop petite, tu ne peux pas comprendre...” J’avançais librement. Non que je ne courusse le risque de me meurtrir ! Je me heurtai aux pages sans alinéas du Médecin de Campagne, du Lys dans la vallée, aux falaises typographiques d’où Séraphîtus domine les fjords. Plutôt que de mes les approprier ligne par ligne, je les franchissais d’un saut. […] De temps en temps je demandais à ma mère qu’elle laissât toucher l’épingle de cravate de Balzac. Quelles mains détiennent maintenant la boule de sardoine rougeâtre, autour de laquelle gravitait un serpent d’or ? C’est aujourd’hui que je le regrette, aujourd’hui que je la voudrais mienne, que j’imagine les petites mains de Balzac disciplinant, sous l’épingle bizarre, les plus d’une cravate qu’eût blâmé Henri de Marsay. […] Aucune oeuvre romanesque ne se compare à celle de Balzac. Célèbre, elle est mal connue. Nous ne sommes pas nombreux à la posséder, dirai-je, cadastralement, à pouvoir dire : ici est la maison du vieux Rouget, ici le toit où Fario rangeait son blé, là le champ où s’ébattaient les Tousard, ni de petits rapaces. […] La douloureuse fécondité d’un écrivain traqué, ses déboires de financier, d’imprimeur et de planteur d’ananas, je les ai ignorés tant qu’a duré ma gloutonnerie de lecteur. […] Dites-moi, redites-moi la forme de sa grosse tête, l’éclat de son rire, sa lèvre rebordée, le reflet de la fenêtre quand le jour se levait, sur ses cheveux lustrés. Dites-moi les dernières heures de sa vie, qu’elles soient contées par Mirbeau, d’après Gigoux ou que le récit de Mirbeau soit démenti par un autre. »