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Arts & Autographes

Réf : 33410 LITTERATURE

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MORELLET abbé André [Lyon, 1727 - Paris, 1819], philosophe français.

Lettre autographe signée

Lettre autographe signée, adressée à M. Godin, négociant à Lorient. « Thimer, près Chateauneuf en Thimerais, le 20 juin » [1789] ; 3 pages in-4°, adresse sur la 4e page. Très belle lettre écrite le jour du serment du Jeu de paume, prélude de la Révolution française. « Ne croyes pas qu’il y ait eu de ma part aucune negligence à repondre à votre obligeante lettre et à vous remercier de votre envoi non moins obligeant de bon caffé dociden[d’Occident] et de Betelfagui [Turquie]. Le lieu d’où vous voyes ma lettre datée me servira d’excuse. […] Je n’y recois les lettres que deux fois par semaine quoique je ne sois qu’à 22 lieues de Paris ce qui entre dans les admirables arrangemens de mrs [messieurs] des postes et ce qui est très facheux pour ce pays cy et puis votre lettre est restée à Paris parce qu’on m’y attendait de jour à autre et enfin je vous repons d’icy parce que mon incertitude sur mon retour est encore la même. J’ai envoyé votre lettre à Madame Helvetius à Auteuil afin qu’on y recut le caffé et qu’on payat le voiturier en mon absence mais je n’ai pas encore reçu nouvelle de son arrivée. Il faudra s’il vous plait que vous attendiez mon retour à Paris pour etre payé voilà à quoi on s’expose avec trop de confiance pour des hommes qui vont courant comme moi et que leurs creanciers ne savent où prendre, mais vous ne perdres rien. Pour parler plus serieusement faites moi la grâce de m’indiquer quelqu’un de vos correspondans à Paris à qui je puisse remettre ce que je vous dois à mon arrivée qui sera à ce que j’espere d’icy à 7 ou huit jours. Je verrai avec grand plaisir votre député lorsqu’il sera question de notre chere compagnie qui ne tiendra pas je crois beaucoup contre le retour de vos reclamations. Je suis icy asses mal au courant de vos nouvelles. Je sais seulement que les espoirs sont encore loin d’etre raprochés. Je me felicite tous les jours de n’etre pas dans cette galere, je plante mes choux, je mange mes pois et mon lait. J’arrange la retraite de mes vieux ans qui est fort jolie. Songes bien que si vous venes à Paris et que vous ne preniez pas la route d’Angers qui passe à ma porte et qui est fort belle je ne vous le pardonne ni à la vie ni à la mort. Quand vous etes à la poste de Chateauneuf vous etes precisement à 500 toises de Thimer où vous trouveres un bon lit et bon visage d’hôte et si mes femmes y sont je vous y promets les plus jolis reversis du monde. Vous voyes bien que je ne puis vous donner de nouvelles des affaires de Paris avec lequel j’ai des communications si difficiles. Les papiers publics vous en instruisent mieux que je ne pourrais faire. Mais je peux vous dire du pays que j’habite une mauvaise et une bonne nouvelle. La mauvaise est que la misere est horrible et le bled à 55# le septier de Paris de 240 #, la bonne est que la récolte dans cette partie de la Bausse (car je suis encore en Beausse) n’est pas mauvaise et qu’on peut esperer quelque soulagement. Je vous prie de ne point m’oublier et même de me mettre au nombre des personnes sur le tendre attachement desquelles vous aves droit de compter. Je suis avec une respectueuse consideration, Monsieur, Votre très humble et très obéissant serviteur. L’abbé Morellet. »